Silja Trindler

Une traque ADN d’ampleur mondiale
Derrière le meurtre de la plage
Vingt-trois ans après la mort d’une touriste suisse en Gironde, le pôle “cold cases” de Nanterre a repris le dossier. Le tueur ayant laissé son empreinte génétique sur la scène de crime, son identification passe aujourd’hui par une recherche vertigineuse hors de nos frontières.
Un coin de paradis français chéri de toute l’Europe a été souillé par un meurtre sauvage et la justice n’en finit pas de chercher à réparer l’abomination. La mission paraît impossible : 30 000 à 40 000 touristes étrangers, belges, néerlandais, allemands, britanniques… séjournaient en août 2000 autour de Carcans-Plage, dans la région viticole du Médoc, entre l’estuaire de la Gironde et le spot de surf de Lacanau. Et parmi eux probablement le meurtrier de la jeune Suissesse Silja Trindler, 18 ans. Pour relancer cette enquête européenne, voire mondiale, le nouveau pôle judiciaire de Nanterre qui s’occupe des « cold cases », et qui a compétence internationale, était donc tout indiqué.
Vacancière, Silja a été retrouvée morte le 5 août 2000 dans les dunes, étranglée et étouffée, du sable plein la bouche. Elle avait disparu la veille au soir, deux témoins l’ayant vue pour la dernière fois seule sur la plage aux alentours de 19 heures. Elle était arrivée le 24 juillet avec ses parents et son frère au camping, et le 5 août était le jour de leur départ. Les valises étaient prêtes le samedi, pour le fameux chassé-croisé estival. Beaucoup d’aoûtiens étaient déjà arrivés. Le champ des suspects est donc vertigineux.
Crime d’opportunité
Silja était une jeune fille effacée, en proie à un certain mal-être psychologique. Les photos d’elle montrent une jeune fille svelte, à la mine un peu sombre ou barrée d’un timide sourire. L’ambiance familiale n’était pas excellente à l’époque des faits, comme dans bien des foyers. Elle avait du mal à se mêler aux autres estivants, ne serait-ce qu’en raison de la barrière de la langue – Silja parlait le suisse allemand. Des témoins du camping l’ont même vue pleurer en silence. Si l’autopsie a montré qu’elle avait eu un rapport sexuel juste avant sa mort, l’hypothèse privilégiée est celle d’un viol suivi d’une mise à mort.
Au contraire de beaucoup de crimes anciens, l’affaire a fait l’objet d’investigations colossales et prolongées dans le temps. Jusqu’à 50 gendarmes ont interrogé environ 20 000 personnes sur deux décennies, en France et à l’étranger, retrouvant notamment un par un tous les estivants du camping. Quelque 5 700 tests ADN comparatifs ont été réalisés avec l’empreinte génétique extraite du sperme retrouvé sur le corps de Silja, ce qui a permis de fermer a priori la piste locale, tous les habitants étant passés à ce révélateur. La procédure a aussi refermé d’innombrables pistes internationales et celles de tueurs déjà condamnés, comme Frédéric Ramette, auteur d’un meurtre similaire sur l’île de Ré en 2003 sur une autre jeune fille, Audrey Texier. Un homme vu en compagnie de Silja peu avant sa mort, identifié après des années par son signalement, a été retrouvé à La Réunion et mis hors de cause.
« C’est un dossier qui m’a habité pendant onze ans. Il y en a eu d’autres mais celui-là était particulier. Beaucoup de gens ont travaillé dans cet esprit sur cette affaire », explique Didier Teissedou, ancien directeur d’enquête qui a repris le dossier en 2011. Était-ce par empathie pour le sort funeste de cette jeune fille fragile ? Sa vie familiale a été fouillée en profondeur avec l’aide des policiers suisses de Zurich. S’ils ont exhumé une ancienne affaire d’agression sexuelle dans son enfance commise par un voisin, cette partie de l’enquête a fini dans une impasse, et sans doute ajouté encore à la douleur de sa famille. « Aujourd’hui, je n’ai pas d’avis définitif, mais je pense qu’on est plus sur un crime d’opportunité », assure Didier Teissedou. Donc sur un acte commis par un homme de passage, venant peut-être de loin.
Défi juridique
En 2017, un ADN plus complet que celui des empreintes précédentes a été extrait des pièces à conviction et une recherche dite par parentèle – qui consiste à identifier des parents plus ou moins proches du suspect à défaut de lui-même directement – a été menée dans le Fichier national des empreintes génétiques (Fnaeg) français. Elle a abouti à une liste de 985 personnes, dont environ 70 ont fait l’objet d’investigations très complexes (identification, localisation, auditions)… mais sans succès à ce jour. Reste donc à élargir la recherche à l’étranger. Un traité signé en 2005 entre la France et six autres pays membres de l’Union européenne, puis largement étendu ensuite (notamment à la Suisse), a permis un échange automatique entre les bases de données. Il existe également une passerelle plus large entre les fichiers au plan mondial, gérée par Interpol. Si l’empreinte du tueur de Silja ne figure pas encore dans un système européen mais qu’elle y échoue plus tard, la correspondance avec l’ADN inconnu prélevé sur la scène de crime se fera-t-elle automatiquement ? La question est cruciale, et ce n’est pas la seule. Autre question : une recherche en parentèle est-elle possible à l’étranger ? Certes, elle risquerait de déboucher sur un nombre trop écrasant de résultats mais, selon le biologiste Christian Doutremepuich – dont le laboratoire à Bordeaux a travaillé sur l’affaire Trindler –, de nouvelles techniques permettent désormais de restreindre cette recherche par parentèle. Peuvent-elles être mises à contribution ?
Enfin, il y a cette zone grise de l’enquête criminelle qui consiste à solliciter, par l’entremise du FBI, les fichiers génétiques américains privés, constitués à partir de demandes de particuliers, à des fins généalogiques. Des millions d’Européens absents des fichiers judiciaires y figurent. À la fin de 2022, une affaire a spectaculairement rebondi par ce biais-là – et c’est une première : en combinant l’exploration de ces fichiers avec la recherche en parentèle, un magistrat a retrouvé un violeur en série surnommé le « prédateur des bois », qui sévissait depuis plus de vingt ans en France. Mais le dossier n’étant pas encore jugé, on ignore encore si la justice validera au final le procédé.
La résolution de l’affaire Trindler est donc un défi de modernisation juridique. Mais les obstacles mettent aussi en lumière les limites des pratiques françaises. Aux PaysBas, la police diffuse dans les prisons des « calendriers » exposant des crimes anciens afin de susciter des témoignages de détenus. Même si les magistrats de Nanterre ont prévu de s’y déplacer, il n’est pas acquis que l’idée fasse des émules chez nous. « En France, nous sommes davantage dans cette culture du secret professionnel », a déclaré Caroline Gontran, procureur du pôle « cold cases », lors d’un colloque en mars. Pour l’instant, nos magistrats refusent même d’avoir recours aux médias. La martyre de la plage de Carcans reste donc enfouie sous le sable de tous les secrets.

C'est nickel Manor!

L'affaire Silja Trindler, l'insondable meurtre des dunes de Carcans
RÉCIT - Le corps de cette jeune touriste suisse avait été découvert sans vie et recouvert de sable sur une plage en Gironde à l'été 2000. L'enquête autour de sa mort est désormais entre les mains du pôle «cold cases» du parquet de Nanterre.
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Le corps de cette jeune touriste suisse avait été découvert sans vie et recouvert de sable sur une plage en Gironde à l'été 2000. L'enquête autour de sa mort est désormais entre les mains du pôle «cold cases» du parquet de Nanterre.
Une touriste suisse, à peine majeure, retrouvée morte asphyxiée et recouverte d'un manteau de sable d'une plage de Gironde en plein été. Un meurtre qui a largement choqué l'opinion publique et a longtemps tourmenté les enquêteurs chargés de percer à jour son mystère. Depuis début avril 2023, c'est au pôle «cold cases» du parquet de Nanterre qu'incombe la lourde tâche d'en décortiquer l'énigme, près de 23 ans après les faits.

L'affaire prend racine dans les dunes d'une plage de Carcans, le 4 août 2000. Silja Trindler, 18 ans, disparaît subitement après avoir passé un après-midi à la plage aux côtés d'un groupe d'estivants de son camping. La jeune femme est Suisse et parle seulement l'allemand. Elle et sa famille sont venues passer quelques jours dans cette station balnéaire réputée pour son air paisible. Silja est décrite comme une enfant «fragile», «perturbée psychologiquement» et nourrissant de nombreux problèmes relationnels à l'égard de ses parents. «Elle ne voulait pas venir en France, ces vacances ont été organisées contre son gré» explique pour Le Figaro Didier Teissedou.
Cet ex-gendarme a longtemps officié à la Section de recherches de Bordeaux, où il exerçait le rôle de chef du groupe «homicide complexe». Lorsqu'il récupère le dossier du meurtre de Silja Trindler en septembre 2011, il est le seul enquêteur à s'intéresser à ce dossier «passé au second plan» : «Le magistrat désigné pour instruire le dossier à l'époque ne voulait pas qu'il soit clôturé. Il y avait encore matière à travailler» se remémore-t-il. Sur son temps libre, l'enquêteur reprend l'affaire de zéro. Il commence par tenter de retracer les derniers instants de la jeune femme.

Une jeune femme «mystique» et «ésotérique»
Selon les témoignages récupérés à l'époque des faits, Silja quitte le groupe d'estivants aux alentours de 18 heures pour retourner à son camping. La jeune fille, qui ne parvient pas à retrouver les clés du cadenas de son vélo, repart à pied. Un couple de touristes allemands expliquera aux enquêteurs l'avoir aperçue vers 19h15 le long d'un cordon dunaire. Elle a dans ses mains un bâton avec lequel elle dessine dans le sable des inscriptions en lien avec Bob Marley et «à la sorcellerie». «Elle était dans un monde à part, très mystique, très ésotérique.» relate Didier Teissedou. C'est la dernière fois que Silja sera aperçue par un témoin.
Inquiets de ne pas voir leur fille rentrer au camping, les parents de Silja alertent les forces de l'ordre dans la soirée. De grands moyens de recherche sont lancés dans la matinée : maîtres nageurs sauveteurs, gendarmes locaux et hélicoptères s'engagent pour retrouver la jeune majeure, en vain. Dans la journée, un touriste hollandais qui se promène sur le fameux cordon dunaire est contraint d'enjamber un «montant de sable». Intrigué, il aperçoit une cuisse humaine. Elle appartient à Silja, dont le corps sans vie est recouvert de sable. Son visage est couvert par son slip de bain, sa bouche et ses narines sont remplies de sable. L'autopsie démontrera que la jeune femme est morte par suffocation.
Une enquête est rapidement ouverte par le parquet de Bordeaux pour «homicide». Sur la scène de crime, les enquêteurs prélèvent du sperme. Il atteste que Silja a eu un rapport sexuel concomitant avec l'heure de sa mort, vraisemblablement consenti : aucune trace de violence n'est décelée. Cette trace ADN, en apparence essentielle pour la suite des investigations, donnera finalement beaucoup de fil à retordre aux gendarmes en charge du dossier. «Le sperme était mélangé à du sable, et les moyens de l'époque ne permettaient pas de les séparer. Ce n'est qu'en 2017 qu'un laboratoire a réussi l'entreprise et obtenu un ADN complet» souffle Didier Teissedou.


5700 prélèvements ADN réalisés en France et en Europe
En parallèle, de très nombreuses comparaisons ADN sont réalisées par la cellule d'enquête «Homicide 33» spécialement formée pour résoudre le meurtre avec des gendarmes de la Section de recherches de Bordeaux. Sur les dix premières années, près de 5700 prélèvements sont effectués en France et en Europe. «La difficulté, c'est qu'un festival de reggae s'était tenu quelques jours auparavant à une trentaine de kilomètres du lieu de la mort de Silja» décrit Didier Teissedou. «Près de 40.000 personnes en provenance de France et d'Europe passaient dans le coin à ce moment-là» ajoute-t-il. De quoi compliquer la tâche des enquêteurs, qui doivent travailler sur un échantillon de population majoritairement touristique et donc susceptible d'avoir quitté les lieux rapidement après le meurtre de Silja.
L'ADN identifié et rentré dans les différents fichiers génétiques européens, la cellule d'enquête se concentre sur les témoignages recueillis au fil des investigations. Plusieurs mois après les faits, un homme se manifeste. Devant les enquêteurs, il explique avoir aperçu Silja à Carcans le soir du 4 août 2000 en compagnie d'un homme qui l'aurait ensuite entraînée vers la plage. Ce témoignage, pourtant sincère, entraînera de nombreuses années durant les gendarmes vers une fausse piste. Le témoin, qui avait cru apercevoir Silja le soir de sa disparition, avait en réalité vu un véritable sosie, une jeune femme elle aussi présente à Carcans à la même période. «Cette piste a pollué le dossier. L'homme suspect décrit dans ce témoignage sera même identifié en 2010 et retrouvé à La Réunion. Il sera mis hors de cause après un prélèvement ADN» regrette Didier Teissedou.
Au fil des ans, l'enquête s'enlise peu à peu. La cellule «Homicide 33» se vide de ses enquêteurs à mesure que les pistes s'amenuisent. Quand Didier Teissedou récupère le dossier en passe d'être refermé, il tente d'oublier l'ADN récupéré en août 2000. Le gendarme décide de changer de cap et de se retourner vers la Suisse, pays de naissance de la victime. Avec la brigade criminelle de Zurich, l'enquêteur et ses collègues parviennent à exhumer une véritable «affaire dans l'affaire».

Agressée sexuellement par une connaissance de sa famille
Les enquêteurs découvrent que Silja a été agressée sexuellement à l'âge de neuf ans par une connaissance de sa famille. Les parents de la petite fille ont longtemps tenté d'étouffer l'affaire, ne l'évoquant même pas spontanément aux gendarmes français selon Didier Teissedou. «Les parents de Silja n'ont même pas rencontré les magistrats enquêteurs de l'époque. Entre 2001 et 2015, ils ne donneront aucune nouvelle» peste l'ex-gendarme. Le parquet de Bordeaux, qui a confirmé auprès du Figaro son dessaisissement du dossier au profit du parquet de Nanterre, a indiqué qu'il ne disposait pas d'information au sujet du ou des avocats en charge de défendre la famille de Silja. Même son de cloche du côté de Didier Teissedou : «La famille avait pris un avocat français, mais celui-ci n'a jamais rencontré les magistrats en charge d'instruire le dossier» déplore-t-il.
Cette affaire d'agression sexuelle, associée à un sombre climat familial (des soupçons d'inceste ont longtemps pesé contre des proches de Silja) explique en grande partie la détresse psychologique de la jeune femme l'année de sa mort. «Son adolescence a été marquée par un conflit avec ses parents. L'enquête démontrera qu'elle a même un temps été internée en hôpital psychiatrique à Zurich» poursuit Didier Teissedou. Lui et ses enquêteurs écarteront néanmoins la famille de la jeune femme des pistes à suivre. Le fameux ADN récupéré sur les lieux du crime, mis de côté mais véritable pierre angulaire du dossier, ne matche pas.
Depuis, le mystère du meurtre de Silja Trindler s'épaissit. Parti à la retraite en 2022, Didier Teissedou est parvenu à faire vivre le dossier jusqu'au bout. Cet acharnement a payé, puisque c'est désormais le parquet de Nanterre et son pôle «cold cases» qui poursuivront le travail d'enquête. L'épais dossier d'instruction, entièrement réorganisé, est désormais entre les mains des magistrats de ce nouveau pôle judiciaire consacré aux affaires non résolues. Ils s'attacheront à reprendre l'enquête depuis le début, avec la perspective qu'un jour peut-être, l'énigmatique ADN dévoilera ses derniers secrets.

Manor a écrit:Intrigué, il aperçoit une cuisse humaine. Elle appartient à Silja, dont le corps sans vie est recouvert de sable. Son visage est couvert par son slip de bain, sa bouche et ses narines sont remplies de sable.

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Merci bien camarade,

Je n'avais jamais eu vent de cette information, ça va dans le sens du meurtre à connotation sexuelle....

Je crois qu'ils le précisent dans Code Source:
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edit Kassandra: ah oui c'est dans TV7 alors!

Une page Wikipedia est dorénavant accessible :

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C'est probablement quelqu'un du forum....

En l'espace de 9 jours faire une page Wikipedia aussi riche en information, respect.

Affaire suivante inédit :
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